Dans la vie comme dans le sport, il y a des stars. Ce n'est pas forcément ce qui m'intéresse le plus. Je préfère les étoiles. Celles qui nous éclairent, qui nous guident, celles que l'on rêve de toucher, celles qui nous font faire des voeux et nourrissent nos rêves même si on souhaite ne jamais les voir filer. C'est de celles-ci que j'ai aujourd'hui envie de vous parler.
Hommage à Patrick Edlinger, mort il y a quelques jours à l’âge de 52 ans. Edlinger fait partie de ces gens qui m’ont fait rêver. La révélation fut évidemment le documentaire « La vie au bout des doigts ». C’était en 1982, j’avais 13 ans mais je m’en souviens parfaitement tout comme « Opéra Vertical » réalisé un peu plus tard. Une sorte de choc, de vertige, en le voyant se déplacer et ne faire plus qu’un avec le rocher. L’escalade pure, sans artifice. Sans sécurité non plus. Dans sa façon d’exécuter son sport, Edlinger avait quelque chose en plus, un « charisme », un je ne sais quoi d’indéfinissable dans sa façon de bouger, d’enchaîner les prises. Comme un danseur étoile en train d'improviser une chorégraphie. Avec le rocher pour scène en mode vertical et la nature en décor. L’impression de voir un film au ralenti, sans aucun geste futile, une maîtrise absolue de l’espace et du corps. Incroyable impression que ce contraste entre sa légèreté, sa souplesse, sa finesse et la puissance nécessaire pour se propulser vers les sommets. Plus haut, toujours plus haut, sans peur du vide.
Ce film est de ceux qui nous laissent scotchés dans le canapé, sans aucune envie de jouer de la télécommande, fascinés par les images. Je me souviens des mêmes sensations en regardant le documentaire « Le funambule » (titre original « Man on wire »), oscar du meilleur documentaire en 2009. L’histoire du Français Philippe Petit, funambule donc, qui en août 1974 se promena sur un filin entre les deux tours jumelles du World Trade Center encore en chantier. Un exploit réalisé sans aucune autorisation. « Il n'y a pas besoin de permission quand on a envie de faire des choses belles, raconte l’artiste. Il faut les faire, c'est tout. » Un documentaire saisissant dont les images témoignent d’une folie qui déboucha sur des instants de magie. Car oui, ce qui peut paraître fou devient parfois magique, envoûtant, transcendant. Bouleversant même.
L’histoire du sport, mais de la vie aussi, s’est nourrie de ces exploits nés de la folie, des exploits « inventés » par des passionnés que beaucoup ont probablement considérés comme des dangers parfois, des hurluberlus souvent ou, pour les plus indulgents, de doux rêveurs. Souvent, ces hommes et ces femmes ont été les seuls à croire possible ce que les autres leur promettaient impossible. Mais ils ont suivi leur chemin, guidés par leur passion, par leur intime conviction, accompagnés par leur seule bonne étoile et certains que le bonheur était au bout.
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Cette étoile, les filles de l’équipe de France de rink hockey pourront désormais la porter sur leur maillot, là, juste au-dessus d'un coeur qu'elles ont eu énorme.
Le rink hockey, je me doute que ça n’évoque pas grand-chose pour beaucoup d’entre vous. C’est pourtant un sport très ancien, particulièrement développé au Portugal, Espagne, Argentine et même Italie. En gros, pour faire simple, c’est du hockey avec des patins à roulettes version quad (la version avec roller en ligne s’appelle du roller hockey). Une discipline sacrément spectaculaire où la France, avec ses 6000 licenciés, figure dans le top 5 mondial. Il y a quelques jours, à Recife, au Brésil, les Bleues, déjà vice-championnes du monde lors de la précédente édition en 2010, ont réalisé le plus bel exploit de l’histoire du rink français en battant l’Espagne en finale (3-2 après avoir été menées 0-2) pour aller les décrocher ces étoiles.
Tout ça est très symbolique bien sûr mais la brève commise quelques heures après le titre (lien ICI) a engendré plus de 900 « j’aime » et près de 30 commentaires. Si vous jetez un œil sur les compteurs du foot, du tennis ou du rugby, bien évidemment, c’est encore peu. Mais beaucoup des disciplines regroupées dans « autres sports » rêveraient de telles statistiques. A titre d’exemple, la brève de saut d’obstacles sur la victoire de Kevin Staut lors de la Coupe du monde de Stuttgart (un vrai exploit là aussi) a comptabilisé… 2 « j’aime » et … 0 commentaire. L’équitation est pourtant le 3e sport olympique en terme de licenciés (700 000).
Bien content donc de ce succès d’estime pour le rink qui mérite cet éclairage. Intérieur Sport, la formidable émission de Canal + qui elle aussi préfère mettre la lumière sur l'homme plutôt que sur le sportif, consacrera d’ailleurs un de ses prochains numéros à la discipline, profitant de la rencontre européenne entre Quévert et Barcelone (la section rink du Barça est également la meilleure équipe du monde) qui a eu lieu le week-end dernier. Bien content pour les filles - Elsa Roux (Lyon), Vanessa Daribo (Noisy-le-Grand), Nolwenn Bena (Seynod), Julie Lafourcade (Coutras), Pauline Garin (Pacé), Sidonie Laroche (Gleize), Adeline Le Borgne (Coutras), Emilie Couderc (Quévert), Tatiana Malard (Noisy-le-Grand), Agnès Martin (Coutras), pour leur encadrement et les quelques personnes qui ont compris que si l’on voulait faire parler de son sport dans les médias, il fallait aussi donner du sien, décrocher le téléphone et partir en « campagne ». C’est notamment le cas de Dan Mortreux, responsable de la Commission rink à la fédé et qui depuis plusieurs années m’envoie chaque dimanche le compte-rendu de la journée de championnat (eh oui, quand on est dans la communication sportive, on oublie la notion de dimanche repos). Une démarche qui explique que chaque lundi matin depuis plus d’un an, je vous poste les résultats sur lequipe.fr, créant, je le sais, quelques jalousies…(dont, inutile de le préciser, je me fous royalement). C’est le cas aussi « d’amis » Facebook ou twitter dans différents clubs qui n’hésitent pas eux non plus à faire remonter les infos. Quand on s’appelle rink hockey, il ne faut pas espérer voir arriver spontanément les médias. Il faut aller les chercher. Et eux l’ont compris.
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Etoiles des neiges bien évidemment avec le début de la saison du grand blanc du côté de mes disciplines du nordique. Bien heureux de pouvoir à nouveau vibrer sur un envol de Jason Lamy-Chappuis, notre champion olympique de combiné nordique, de bloquer ma respiration quand Martin Fourcade se présente en tête sur le dernier tir d’un biathlon avec un Norvégien ou un Allemand juste à ses côtés, de m’étirer pour prolonger un vol d’un Thomas Morgenstern ou Simon Ammann, de pousser sur les jambes pour accompagner un Jean-Marc Gaillard ou un Maurice Manificat ou m’extasier sur une arrivée au sprint du surpuissant Norvégien Petter Northug. J’ai eu le privilège de suivre ces disciplines pour L'Equipe pendant quelques hivers et m’y suis fortement attaché après avoir notamment rencontré des grands sportifs mais surtout des hommes d’exception comme Vincent Vittoz, unique champion du monde français en ski de fond (2005 à Oberstdorf où je me souviens avoir versé quelques larmes dans la zone d’arrivée…). Ce blog essaiera de suivre l’actu du blanc certes mais surtout les émotions de cette saison hivernale.
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A la belle étoile enfin pour les 11000 coureurs qui s’élanceront samedi prochain, à minuit, pour la 59e édition de la SaintéLyon, l’une des grandes classiques de la course nature. 70 km entre Saint-Etienne et le Palais des Sports de Gerland à Lyon, à travers les Monts du Lyonnais. Une
course de nuit avec quelques scènes assez magiques : ce long cordon lumineux créé par les lampes frontales des concurrents, cordon qui serpente dans les chemins ; ces halos de respiration dans le froid d’une longue nuit ; ces regards un peu perdus de coureurs dont on distingue les visages derrière la fumée d’une bonne soupe qui réchauffe à la fois le corps mais aussi l’âme ; et puis, au sortir d’une longue nuit, cette vue plongeante sur Lyon qui s’éveille avec au bout les derniers kilomètres sur les quais du Rhône et la délivrance.
Pascal (twitter : @pgb51)